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4.3. La santé déléguée

  • Des prisons en Afrique : expériences, modèles et circulations
  • 2024
  • 12 min 20 s
  • Français

Publié le 31/10/2018

En quoi le fonctionnement du pouvoir en détention influe-t-il sur la production du soin ? Cette séquence s'attarde sur l'impact de la délégation du pouvoir des gardes pénitentiaires aux détenus dans le domaine du soin. Construite à partir d'un entretien mené avec Pacôme, un ancien détenu ayant occupé la fonction de chef bâtiment infirmerie à la Maison d'Arrêt et de Correction d'Abidjan (Côte d'Ivoire), cette séquence discute de l'impact sur les soins de la double allégeance des acteurs sanitaires à l'administration carcérale et aux hiérarchies internes aux détenus

Les corvéables jouent un rôle crucial dans la gestion quotidienne de la prison en raison du ratio élevé de détenus par rapport aux gardiens. Ces détenus, souvent appelés corvéables, peuvent s'occuper de pansements, d'injections, de surveillance nocturne des malades, etc. Ceux qui travaillent à l'infirmerie bénéficient de certains avantages, comme une meilleure alimentation et une plus grande liberté de mouvement. On voit alors la structure hiérarchique de l'infirmerie : différents détenus occupent des rôles spécifiques, allant de la gestion des dossiers à la sécurité et aux soins. Cependant, l'accès aux soins est inégal et dépend souvent des ressources financières ou des réseaux sociaux des détenus. Les détenus les plus aisés, souvent appelés assimilés, ont plus de facilité à accéder aux soins externes, comme les consultations dans les hôpitaux, comparé aux détenus plus pauvres.

Pacôme illustre aussi les défis et les succès liés à la santé en prison. Il raconte des situations où l'administration pénitentiaire a retardé des évacuations médicales, entraînant la mort d'un détenu, et d'autres où une intervention rapide a sauvé une vie, comme dans le cas d'un détenu gravement blessé. Les problèmes de santé des détenus ne se limitent pas à la période d'incarcération. Une fois libérés, les anciens détenus ont souvent du mal à accéder aux soins dans leurs quartiers d'origine, en partie à cause du stigmate de la prison. 

Contribution
Marie Morelle
Frédéric Le Marcis

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